Feuilleton footnos: le Mondial imaginaire

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Hubert Götze

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Message non lu Mer 08 Juil 2009 22:07

Rassures nous tous, t'as tout de meme pas l'intention de faire gagner l'Italie nan ?
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Message non lu Mer 08 Juil 2009 23:01

En fait je n'en sais rien, j'improvise au fur et à mesure et je découvre les résultats à mesure que j'écris.
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Message non lu Jeu 09 Juil 2009 14:27

Feuilleton footnos: le Mondial imaginaire (5ème épisode)

Lien vers le quatrième épisode

25 juin

Les Suédois sont plein de bon sens. Puisque leur ligne d’attaque Engström-Stefansson-Kihlberg mesure, en moyenne, dix centimètres de plus que la défense mexicaine, ils décident d’adopter, le 25 juin à Ottawa, une stratégie simple : débordements, centre bombés et jeu de tête. Leur salut ne viendra pourtant pas de leur ingéniosité tactique mais, simplement, de la faiblesse de leur adversaire. Le Mexique, convaincant le premier jour contre l’URSS (match nul deux partout), est épuisé par le rythme élevé des rencontres et explose au bout de quarante minutes face à l’impact physique des Nordiques. En effet, c’est à cinq minutes de la mi-temps que Sandström, d’un ... tir des vingt mètres, ouvre le score. L’héroïque résistance des Aztèques s’arrête là : Engström (futur Niçois) inscrit un doublé et Påhlsson clôture le score contre un but, tout honorifique, de Díez. La Suède l’emporte quatre à un.

RFA-Espagne ou le combat entre les deux costauds du groupe C, celui de la France. Les Tricolores espèrent que les molosses vont se déchiqueter et abandonner chacun un point. En passant, ils aimeraient entr’apercevoir d’éventuelles faiblesses allemandes. Car le champion d’Europe a ses failles, tout le monde en est convaincu. Encore faut-il les exploiter. Markus Lippmann, « le tueur froid » du VfB Stuttgart (et bientôt d’Hambourg), reprend du droit un centre de rapine expédié depuis l’aile droite par Pfinnitz. Nous jouons depuis ... cinq minutes à Vancouver. L’Espagne est menée un à zéro avant même d’être entrée dans la rencontre. Les Adler (aigles) ouest-allemands sont un peu lourds, un peu lents, peu enclins au spectacle. Mais quelle efficacité dans les duels ! Quelle présence physique ! « Il semblerait que le simple nom ‘d’Allemagne’ intimide les compétiteurs les plus coriaces », constate le renommé entraîneur autrichien Heribert Weber. De fait, on attend plus de l’Espagne. Au jeu plat des Allemands, elle devrait répliquer par sa fougue, son sang, son « ilusión », sa technique individuelle. Mais rien, ou si peu. Un tir d’Adurní, un coup de tête d’Alvaro ... le temps passe quand soudain, l’éclair ! A douze minutes de la fin, Julen Brosas, le petit gaucher Basque entré en jeu cinq minutes auparavant, fuse sur l’aile droite, ballon collé au pied, rentre dans la surface et tire ! Wüthrich, peu sollicité jusqu’ici, repousse sur Quique Romero qui ne pardonne pas. Un partout ! Bonne nouvelle pour les Bleus mais affront malvenu : on ne chatouille pas impunément un aigle. Volckers, le colosse de l’entrejeu allemand, envoie valser deux vis-à-vis sur une balle aérienne et, de la tête, lance Lippmann qui se fait crocheter à la limite de la surface. M. Figueiredo, l’arbitre brésilien, s’entend siffler un cruel penalty que transforme ... Lippmann. Il reste neuf minutes, les Allemands mènent deux à un et ne cèdent plus un pouce de terrain. On se demande comment les Tricolores parviendront à les faire trembler.

Le soir suivant, Montréal espère, enfin, voir l’équipe du Canada arracher un point ou au moins marquer un but. Las. Le Maroc, sur la lancée de sa victoire historique contre l’Uruguay, fait une démonstration de football rationnel et inspiré, chatoyant et intelligent, applaudi en fin de compte par le Stade Olympique et loué par Schembri, le sélectionneur canadien : « on voit rarement une équipe aussi positive et offensive dans un contexte pareil. Chapeau aux Marocains et à tout le football africain. Nous avons beaucoup appris ce soir. » Tarif de la leçon ? Deux-zéro pour le Maroc, buts de Malebi sur corner et volée somptueuse du pied gauche signée Kaïssi, la perle du WAC Casablanca. « Nous pouvons nous qualifier en quarts de finale », affirme calmement celui auquel l’Europe s’intéresse enfin. Qui en doutait, à part les Anglais ?

26 juin

« Allez les gars, c’est l’heure. On meurt ou on continue. On a pas le droit de renoncer maintenant ! Si vous ne le faites pas pour les supporters, faites-le pour vous, pour tous les sacrifices consentis jusqu’ici ! » Dominique Cyr, dans sa peau de capitaine, bouscule ses équipiers avant le France-Colombie de l’espoir. Espoir fou car il faudrait ensuite s’attaquer à l’Everest allemand. « Victoire indispensable ... quand même ! », encourage « France Football ». « Montrons que le football français existe », enchaîne « L’Équipe ». La Colombie, jusqu’ici, n’a fait trembler personne. Passée sous le camion allemand, la sélection sud-américaine, qualifiée inattendue, a ensuite arraché un point aux Nigérians mais semble à côté de son sujet. Elle dispose néanmoins en Iván Salvatierra d’un avant-centre remuant, bien aidé par Solozábal, le meneur de jeu chevelu, un peu lourd mais clairvoyant. L’absence d’impact physique des Français leur permet enfin de s’exprimer dans cette compétition. Et d’ouvrir le score ! A la 26e, Salvatierra, oublié par la charnière Cyr-Dauberty, trompe Dillinger du gauche. Le Coq baisse la tête.

« Et nous maudissions encore ces débuts de rencontre bonne poire des Français. Mauvais échauffement ? Collation trop lourde ? Ou, simplement, inaptitude à la compétition ? Une Coupe du Monde semble, c’est l’évidence même, exiger de ses participants une concentration de tous les instants et les Français s’obstinaient à s’offrir une demi-heure de sieste en plus avant, enfin, de commencer leur match. Défaut toléré contre le Nigeria, fatal contre l’Espagne et, heureusement, sans dommage contre les Colombiens. Mais au prix d’une débauche d’énergie telle que les six jours de repos avant le duel contre la RFA sont plus que bienvenus. »

« L’Équipe », sous la plume de Jacques Ferran, déplore à juste raison la lymphatie des Tricolores qui attendent toujours d’être stimulés pour s’exprimer. Principal visé : le Messin Philippe Stora, dont on dit qu’il porte le maillot négligemment hors du short pour cacher un début de ventre... Mais que serait l’équipe de France sans lui ? À la 54e, il trace une ouverture lumineuse depuis le rond central en direction du jaillissant Pontal. L’ailier stéphanois, parti à la limite du hors-jeu, a ensuite le temps de prendre un café, un biscuit et de payer l’addition avant d’offrir un centre en retrait parfait à Hutin qui égalise. Il faut battre le Colombien quand il est assommé et, cinq minutes plus tard, Ostermoz offre son mètre quatre-vingt-cinq à un corner de Stora (qui d’autre ?) pour doubler le score. Et le sceller car les Bleus, réduits à dix à la 70e (expulsion du latéral Le Gall), se retranchent dans leur camp et défendent énergiquement leur avantage.

« On a fait notre travail honnêtement. Dormons, récupérons et, ensuite, pensons à l’Allemagne », conclut Albert-Michel Henry.

L’Angleterre, quelques heures auparavant, avait été la première à conclure sa campagne du premier tour. Sans brio, elle avait coincé l’Uruguay en la prenant à son propre piège de la virilité. Verdict : sept cartons jaunes, aucun rouge (grâce à la bonhomie de l’arbitre tunisien M. Jallaoui), aucun but et quatre tirs cadrés (trois anglais, un seul pour l’Uruguay). Qu’importe, Messieurs les Anglais se qualifient, probablement à la première place, de ce groupe très faible où la décision se fera entre Uruguayens, Yougoslaves et Marocains. La préférence du public neutre va évidemment vers ces derniers, « seule équipe de ce Mondial à jouer un football sans arrière-pensée », diagnostique « Le Soleil », quotidien québécois.

Des arrières-pensées, l’Italie en a pour deux. Et même plus. Un but marqué, aucun encaissé en cent-quatre-vingt minutes, ces chiffres en disent long sur la largeur d’esprit du champion du monde. Un autre chiffre ne l’incite pas à l’exubérance : 1966 ou le souvenir d’une défaite contre la Corée du Nord au premier tour du Mondial anglais, coupant la route des quarts de finale aux Italiens. Masochisme ou réelle inquiétude, les tifosi agitent ce spectre à l’heure où la Squadra Azzurra doit affronter la faiblarde Chine. Aucun des joueurs présents à Edmonton n’a participé à la débâcle de Middlesbrough et les tenants du titre pensent plutôt au match contre la Belgique, le 30. Dans cette perspective, ils distillent au gramme près leur énergie, marquent deux buts en contre (Floriani, Caruzzo) et gèlent le cuir l’oeil sur la montre. « Comme des fonctionnaires en fin de carrière », mord un frais retraité de la Squadra. « Qu’importe, les quarts de finale, notre premier objectif, ne sont plus très loin », répond Claudio Marinello. De l’autre côté des Alpes, on aimerait pouvoir en dire autant.

27 juin

Seuls deux matches sont programmés en ce 27 juin, mais lesquels ! L’Argentine conclut son premier tour face à l’intrigante Belgique tandis que l’URSS défie le Brésil frileux.

Les albicelestes, après avoir pris les rênes du jeu contre l’Italie pour ne récolter qu’une défaite, « sont assis entre deux chaises tactiques », constate « Le Miroir du Football » : « audace ou contre ». Contre une Belgique portée sur l’expression athlétique et un jeu sans calcul, il vaut mieux adopter la première stratégie. Evaristo Pastor, le sélectionneur argentin, acquiesce et ses joueurs aussi, la rencontre est donc animée, vivante mais, en fin de compte, assez peu palpitante pour deux raisons : la redoutable efficacité des Argentins et ... les redoutables bêtises de Godfried Pecqueur, le gardien belge. Celui-ci, âgé de 27 ans, connaît une drôle d’expérience. Doublure en sélection, il a bénéficié de l’absence du titulaire Lampaerts suspendu pour une affaire de paris clandestins. Quand le Mondial commence, il n’a pas joué depuis trois mois après une fracture du scaphoïde. Wilfried Smet lui a maintenu sa confiance et l’Anderlechtois accomplit un bon Mondial ... jusqu’à un centre (raté) de Roldán qu’il voudra intercepter d’une main et laissera échapper dans les pieds de Corrado (1-0, 17e). Les Belges, frappés par le sort, réagissent avec vigueur, par Joris de Baecker notamment. Le solide attaquant brugeois secoue l’arrière-garde sud-américaine et manque de voir ses efforts récompensés à la 42e avec un tir qui rase la barre. Cent-vingt secondes plus tard, Pecqueur sort à l’aventure sur un long dégagement défensif argentin, rate son dégagement au pied et ouvre le chemin du but à Torrevilla. Les Diables Rouges n’éteignent pas la flamme en seconde période mais, comble de l’infortune, le gardien adverse, Medina, est dans un jour béni. Moreni inscrit donc un troisième but (sur coup-franc) avant que Tom Lauwe, enfin, ne marque le but de l’honneur belge.

« Le Brésil à l’épreuve », annonce « L’Équipe ». « Brasil, o povo espera ver-te » (Brésil, le peuple espère te voir), répond le « Globo ». Ce Brésil-URSS, le rouge contre l’or, est très attendu. La Seleção possède l’avantage de la fraîcheur avec deux matches peu exigeants (Pologne et Mexique) disputés en une semaine, sans déménager de Toronto, tandis que l’URSS en est à sa quatrième rencontre en neuf jours avec, dans l’intervalle, un vol entre Ottawa à Toronto. Les experts jasent sur l’organisation de la compétition ... et les Soviétiques jouent, admirablement préparés au cours d’un long hiver qui les a amenés au Canada frais et dispos. Le Brésil s’en rend compte et rompt bien vite avec le rythme pépère qu’il avait adopté contre la Pologne et le Mexique. Les échanges sont vifs et variés. Bryshin sauve deux buts tous faits devant Elefante et Teo Dias. Rómulo (qui n’est pas gardien), en réponse, sauve sur sa ligne, de la main, un tir de Polkuryak. Stoïcisme des Soviétiques : « après le but refusé contre la Pologne, cela ne peut plus nous affecter », répondent-ils et ils le prouvent en ouvrant le score à l’heure de jeu par Pyanov. Baltemar Gottardi se tortille sur son banc et lance deux atouts offensifs, Alan Queimado (dont le surnom, qui signifie « brûlé », est dû aux cicatrices de sa vérole enfantine) et Josué, à la place d’un milieu défensif et d’un latéral. Courageux ... et ça marche ! Alan Queimado réalisé un numéro sur son aile gauche et adresse un centre vrillé qui se fiche tout seul, comme un grand, dans la lucarne soviétique. Applaudissements du Rogers Centre de Toronto qui n’a pas tout vu ! Teo Dias, sentant l’écurie et un résultat qui lui déplaît, dos au but dans l’arc de cercle de la surface russe, ose un ciseau retourné soudain qui frappe la barre et ... le dos d’un défenseur soviétique avant de filer au fond. Il reste cinq minutes et le match flamboie car les Russes (Ukrainiens, plutôt) n’abdiquent pas. Magnifiques, ils refluent sur la cage adverse. Un énième débordement d’Atanassovich sème la panique dans la défense brésilienne et le pied du remplaçant Zytynsky force la décision, après trente secondes d’arrêts de jeu. Deux partout, le public est debout et les Soviétiques aussi, dans l’attente des derniers résultats de leurs rivaux suédois et polonais. Au classement : 1) Brésil 5pts (3 matches, 5-2) ; 2) URSS 5pts (4 matches, 7-6) ; 3) Suède 2pts (2 matches) ; 4) Pologne 1pt (2 matches, 0-1) ; 5) Mexique 1pt (3 matches, 3-8)

A suivre
Dernière édition par pacoborel le Mer 26 Aoû 2009 11:56, édité 2 fois.
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Polska King

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Message non lu Ven 10 Juil 2009 8:21

j'ai ma petite idée pour le résultat du match Suède - Pologne :lol:
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Message non lu Ven 10 Juil 2009 10:46

pascal a écrit:j'ai ma petite idée pour le résultat du match Suède - Pologne :lol:


Je vois 1-0 pour les Polonais but de Lato. J'ai lu ton fascicule Polska 74, très intéressant (j'ai reconnu quelques copy and paste de l'année du foot 74, petit plagieur !). Magnifiques photos aussi.
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Message non lu Jeu 16 Juil 2009 17:07

Feuilleton footnos: le Mondial imaginaire (6ème épisode)

Lien vers le cinquième épisode

28 juin

Les Ouest-Allemands, malgré un bilan parfait (deux victoires en deux matches, cinq buts marqués contre un seul encaissé), ne grimpent pas aux arbres. Humilité en bandoulière, ils affirment que « le plus dur est à venir » et admettent qu’hormis la Chine, « tous les adversaires de ce Mondial sont compliqués », ce en quoi ils ont raison. Ainsi, ils abordent le Nigeria avec prudence et circonspection, même si les « Green Eagles » quasiment éliminés. Pourquoi cette humilité toute nouvelle alors que la National Mannschaft est championne d’Europe ? Probablement l’absence de ses deux meilleurs joueurs, le gardien recordman des sélections Bernd Hausknecht (tendons sectionnés par ... une vitre brisée) et leur meneur de jeu Hans-Karl Rammer, qui s’est mis en retraite de la sélection à seulement 30 ans, officiellement « pour consacrer plus de temps aux siens », officieusement pour divergences de vue avec les huiles de la DFB. Or le n°10 de Mönchengladbach était depuis dix ans l’homme de base, l’inspirateur de l’équipe de RFA. Sa vision du jeu, sa force de frappe et sa puissance physique lui permettaient de récupérer, distribuer les ballons et marquer les buts décisifs. Bref, de donner le tempo. Rammer parti, la RFA a dû tourner une page sans savoir vraiment quoi écrire sur la suivante. Certes, Lippmann marque toujours et Volckers, qui a pris la place de l’absent au milieu de terrain (avec le brassard en prime) est un monstre en son genre mais ne possède pas l’âme romantique du beau Hans-Karl. L’équipe d’Allemagne s’est changée en char d’assaut, écrasant tout sur son passage mais pas très agile dans les virages. Cela peut suffire pour passer le premier tour, voire les quarts mais ensuite ?

Les Nigérians, nous l’avons vu, n’ont pas ces problèmes. Contents d’être là, ils défendent leur drapeau avec acharnement et déploient leur jeu puissant et physique sous le dôme du BC Place Stadium de Vancouver, premier stade couvert à recevoir des rencontres de Coupe du monde. Tant mieux car il pleut dehors. Défier les Allemands sur le terrain athlétique est assez téméraire et on s’étonne de l’aveuglement tactique du sélectionneur nigérian, l’Anglais Conway, qui dispose pourtant d’excellents techniciens (Adams, Somozeni). Résultat des courses, les Nigérians tiennent un quart d’heure, une demi-heure puis se font piéger à la 33e sur un centre de Göllwitz mal dégagé et repris aux vingt mètres par Volckers, décidément précieux. En seconde période, le stoppeur Brückler reprendra de la tête un corner de Pfinnitz pour conclure la marque, Wüthrich se rassurant avec quelques parades sur les rares tirs nigérians. Deux à zéro, qualification ouest-allemande et optimisme français : « ils ne sont pas impressionnants et n’auront plus rien à jouer contre nous ! » A voir.

Le Pologne-Suède prévu en soirée à Ottawa est d’une importance capitale. Pour les deux équipes, qui doivent l’emporter si elles veulent aborder leur dernier match de poule en position de force ... et pour l’URSS, qui a tout intérêt à voir ses deux concurrents partager les points s’il veut espérer passer. Les Nordiques sont favoris : ils manifestent une belle santé et marquent trois buts par match contre ... aucun pour la Pologne. Les Polonais, cependant, après deux intenses batailles face aux Brésiliens et aux Soviétiques, n’ont rien d’une victime expiatoire. Leur collectif est brillant et leur enthousiasme réfute l’image lisse et marmoréenne que l’on se fait de l’athlète de l’est. Face aux gros chats suédois, ils livrent un duel épique (un de plus) et très mal entamé quand Kihlberg, oublié au deuxième poteau, trompe Nowoszyl après six minutes. Remontés comme des coucous, recadrés par leur entraîneur Zbigniew Zabrodski, les Polonais se rebiffent. Grzegorz Moskalewski profite d’une mésentente entre Sandqvist et son défenseur Ohlgren pour égaliser dès la vingtième minute. Le match a nettement reflué et c’est en toute logique que la Pologne prend l’avantage sur penalty de Chmiel sanctionnant une faute sur l’ailier Tkacz.

Les Suédois n’en sont plus à une course-poursuite près et haussent le rythme en seconde période. Les lourds défenseurs polonais tirent la langue, surtout le libero Jakubowski dont la caravane tracte 88 kilogrammes. Leif Bengtsson, le sélectionneur suédois, sort son avant-centre Stefansson, taillé dans un chêne, pour le vif et rapide Nystén. Pari gagné : à la 64e, le petit Nystén, remplaçant à l’Ajax, reprend du genou un centre dévié. « Tous les buts comptent, même les moches », s’amusera-t-il. L’affaire amusera moins les Polonais qui, malgré un dernier tir sur la barre, doivent concéder un point et l’élimination.

« C’est le sport, regrettera Zabrodski. Mais le tirage au sort nous a été cruel : dans tous les autres groupes, nous serions passés ». Les Suédois n’ont cure des lamentations de l’entraîneur déçu : ils ont les yeux vers le dernier match, décisif, contre le Brésil.

29 juin

Ce 29 juin est jour de jugement dernier dans le groupe A, où Uruguay, Yougoslavie et Maroc se disputent le deuxième ticket pour les quarts de finale (Angleterre qualifiée). En début de journée, pour le compte du groupe C, une surprise était venue de Regina, comblant d’aise la délégation française. L’Espagne, en effet, avait pataugé contre la Colombie, pourtant réduite à dix pour les vingt dernières minutes, au point de concéder un match nul et vierge. Bilan espagnol : quatre tirs cadrés, aucun côté colombien mais un formidable cadeau pour les Tricolores qui, à l’orée de leur rencontre face à la RFA, ont un point d’avance sur l’Espagne (quatre contre trois). Un nul pourrait suffire au cas où l’Espagne gagne par l’écart minimum face au Nigeria. L’espoir fera vivre Ibères et Français d’ici au 2 juillet.

En attendant, l’espoir est surtout marocain. Jusqu’en 1956 et l’indépendance, les meilleurs éléments de ce pays de football méconnu étaient réquisitionnés par l’équipe de France. Après une longue stagnation et le patient travail entrepris par le belge Victor Roetman, en poste depuis cinq ans, soutenu par une fédération bien structurée et des clubs puissants (Wydad Casablanca, Raja Casablanca, FAR Rabat, Ittihad Tanger, KAC Marrakech), le Maroc peut devenir le premier pays africain à passer un tour en Coupe du monde, après avoir été le premier à y remporter une victoire. Pour cela, les Lions de l’Atlas doivent, au minimum, tenir en échec la Yougoslavie que l’on soupçonne de ne pas avoir tout montré jusqu’ici.

Mais qu’en est-il de l’Uruguay, troisième larron potentiel ? Et bien la Celeste s’est éliminée toute seule en ne sachant pas sortir de son registre abrasif pour vaincre les courageux Canadiens.

Soutenus par un public fidèle jusqu’au bout (65000 spectateurs de moyenne à chacune de leurs sorties), les joueurs à l’Érable ont en effet défendu vaillamment (Leitch impérial, une fois de plus) pendant une heure dix face aux Uruguayens et profité du découragement de leurs vis-à-vis pour marquer deux buts bien troussés. Gary Chiasson de volée sur une remise en touche « atomique » du latéral droit Tim Wallace et Curtis Blackburn, un étudiant de 18 ans, sur un centre en retrait repris du talon. La sélection uruguayenne sera accueillie chez elle par des jets de pièces de monnaie, humiliation suprême en Amérique du Sud. Le Canada finit dernier de son groupe mais couvert de fleurs.

Ne restent donc que Yougoslaves et Marocains. Les coeurs de noctambules français (il est 3 heures du matin à Paris) ne savent s’ils doivent pencher vers les premiers, dont de nombreux artistes ont brillé en championnat de France, ou les seconds, vent de fraîcheur et d’allégresse sur la compétition.

Les destin non plus ne sait pas se décider. La rencontre ressemble à du poker-menteur : les Marocains déroulent leur jeu au sol, basé sur leur trio médian composé de Kaïssi (classe, clairvoyance), Malebi (récupération, hargne) et El Hijaoui (vitesse, percussion) mais semblent retenus par un fil invisible nommé peur de gagner. En face, les Balkaniques, qui n’ont jamais brillé par leur solidité mentale, s’emberlificotent dans des manoeuvres individuelles sans lendemain. La paire attaquante Simeunovic-Zilic attend des ballons qui restent collés aux pieds des milieux de terrain, notamment de Karic, exaspérant d’individualisme. Tout cela ne fait pas une soupe très digeste et Ivica Kocija, le sélectionneur yougoslave, s’en rend compte. A la pause, il sort Karic (furieux) et Vicepar, ce dernier n’ayant pas fait oublier l’absence de Brnovic, toujours suspendu. Entrent à leur place deux petits modules, Sead Maric et Zdenko Djelenka, le premier pour occuper le côté gauche (comme à Nice) et le second pour tirer les ficelles du jeu ainsi qu’il le fait depuis deux saisons sous le maillot de Rijeka.

Kocija a eu le nez fin : les Yougoslaves jouent enfin à leur niveau, gagnent progressivement du terrain et privent les Nord-Africains de ce ballon qu’ils aiment tant. Contraints de jouer contre nature, les Marocains plient et rompent vite, trop vite, à la 57e quand Simeunovic dévie opportunément une frappe de Capljic. Six minutes plus tard, après une alerte sur les buts de Jankovic (coup-franc de Kaïssi), Djelenka se charge lui-même d’enfoncer le dernier clou du cercueil. A vingt-cinq mètres du but légèrement décalé à gauche, il expédie, sans élan, un ballon délicatement enroulé dans la lucarne opposée. Deux nouveaux buts yougoslaves (Zilic sur penalty, Pecovski) donnent au résultat une allure de déroute cruelle pour les Marocains mais impressionnante dans le forme. « Ce Mondial a perdu son équipe la plus enthousiaste mais, dans la foulée, récupéré un candidat au titre de premier calibre », constate « L’Équipe ».

Verdict du groupe A : 1) Angleterre 6pts (6-2) ; 2) Yougoslavie 5pts (7-2) ; 3) Maroc 4pts (6-7) ; 4) Uruguay 3pts (2-5) ; 5) Canada 2pts (2-7)

30 juin

C’était prévisible, deux qualifiés dans un groupe de cinq aboutiraient à une poignée de rencontres sans enjeu, ni jeu, ni spectateurs. C’est le cas du Portugal-Chine de Winnipeg. Sous une pluie d’après-midi, seuls 18000 personnes (supporters portugais pour la plupart) emplissent les tribunes du Canad Inns Stadium et assistent à une victoire sans émotion ni passion des Portugais (2-0, Tomé et Pedro Tavares) sur ce fantôme d’équipe de football qu’est la Chine, présentée comme un « assemblage incolore de joueurs récitant constamment la même leçon » par un journaliste portugais. Celui-ci sera tout aussi sévère avec sa propre sélection en la qualifiant de « bande d’épiciers en vacances ». C’est un peu injuste pour la Selecção qui rentre au pays avec un bilan équilibré (quatre points en quatre matches) sans jamais avoir été ridicule. Elle aura péché par le manque de profondeur de son effectif et « son incapacité à changer de rythme », selon son capitaine Valentim Gomes.

L’Argentine qualifiée dans ce groupe D, il ne reste aux Italiens qu’à ne pas perdre contre la Belgique, mission dont ses joueurs sont passés maîtres au sein de leurs clubs respectifs, en coupes européennes ou dans leur championnat, le plus fermé du monde. Wilfried Smet ne s’affole pas devant l’ampleur de l’événement (« si nous sommes éliminés, nous ferons un bon repas et partirons tous en vacances ») et lance une attaque à deux têtes (De Baecker le « taureau brugeois » et Neyrinckx) soutenue par un milieu de terrain très offensif (Lauwe-Courant-Temmerman-Galens) et une défense en ligne agressive. Il met également son gardien Pecqueur, très entamé par ses erreurs contre l’Argentine, sur le banc, demande à ses joueurs d’oublier la fatigue accumulée (match il y a soixante-douze heures plus déplacement depuis Winnipeg jusqu’Edmonton) et touche du bois avant de s’installer sur son banc « car je suis superstitieux », précise-t-il.

Les Italiens-Machiavel comptent bien sur cette fatigue belge pour arriver à leurs fins. Installés autour de leur invincible Donadel dans les cages, de leur libero et capitaine Marinello et d’une défense où le stoppeur Cortese impressionne par son autorité au fil des matches, ils prennent le vent et attendent. Parfois, leurs avants (Floriani, Forlì) s’offrent des billets de sortie et viennent chatouiller le but adverse, de plus en plus près à mesure que le temps passe. Donadel et ses paluches géantes n’a pas grand-chose à faire, en revanche. Du coup, le public bâille et on le plaint. Les Diables rouges, émoussés, se retrouvent dans la peau des Argentins une semaine auparavant et débitent un long monologue d’impuissance.

Soudain, Temmerman-longues jambes ébauche un bel alexandrin côté gauche, salue les varices de Del Torchio (36 ans) et délivre un centre que Marocchi, le maladroit, détourne dans ses buts. Un csc italien ! A vingt-cinq minutes du terme ! En Coupe du monde ! Les sept plaies d’Égypte ont frappé l’Italie tandis que le commentateur de la télévision belge francophone entonne « La Brabançonne » derrière son micro.

Fulvio Giacomi, le sélectionneur italien, en a vu d’autres à 68 ans tassés mais il est secoué au point d’attendre dix minutes pour réagir. En désespoir, il lance Enzo Di Gennaro, le meilleur buteur du dernier Mondial, à la place ... d’un milieu offensif. Même convalescent, l’ « azzo » de la Juve et de la Squadra pèse son poids sur le mental de ses équipiers et des défenseurs adverses. L’Italie, dos au mur, se cabre face à l’inéluctable, attaque de tous côtés, ressemblant soudain à la RFA des meilleurs jours. Coups-francs à trente mètres et corners se succèdent sur les buts belges où Thyssen, remplaçant de Pecqueur (et numéro trois chez lui dans la hiérarchie des gardiens), fait preuve de solidité, main ferme sur un obus décoché par Patrizi. Il ne reste que cinq minutes, puis quatre, puis trois et l’idée que le champion du monde va échouer là, à la porte des quarts, puni par sa propre prudence et des Belges trop ambitieux devient réalité quand l’arbitre israélien M. Shan siffle la fin de la rencontre.

« La Belgique n’a rien fait pour mériter sa place en quarts de finale, elle marque sur un coup de chance et se recroqueville », affirme Giacomi, qui avait habitué à plus de sportivité. « Les Italiens m’étonnent », répond Wilfried Smet. « Ils ne marquent que trois buts en quatre rencontres, n’en gagnent que deux et se plaignent de la frilosité de leurs adversaires ? Je peux vous garantir que nous offrirons un très beau spectacle contre l’Angleterre ». En effet, Angleterre-Belgique et Argentine-Yougoslavie sont les premiers quarts de finale connus.

Verdict du groupe D : 1) Argentine 6pts (10-3) ; 2) Belgique 5pts (7-4) ; 3) Italie 5pts (3-1) ; 4) Portugal 4pts (4-3) ; 5) Chine 0pt (0-13)

A suivre...
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Message non lu Mer 22 Juil 2009 16:02

Feuilleton footnos: le Mondial imaginaire (7ème épisode)

Lien vers le sixième épisode

1er juillet

C’était à craindre : une fois consommée l’élimination canadienne, le public local se détourne du spectacle soccer, auquel deux semaines de compétition n’ont bien sûr pas suffi à donner la culture de ce sport. Le phénomène est encore plus visible en ce jour de fête nationale, « Canada Day » au cours duquel se dénoue dans l’indifférence le pourtant passionnant groupe B, où l’URSS croise les doigts pour que la Suède ne batte pas le Brésil par un but d’écart, ce qui l’éliminerait automatiquement. On craint d’ailleurs, dans les rangs soviétiques, un possible pacte suédo-brésilien permettant aux Nordiques de l’emporter un à zéro et aux deux équipes d’éliminer le géant rouge. « Un peu de respect, voulez-vous ! », s’indigne Baltemar Gottardi, le sélectionneur brésilien. « Nos respectons trop le sport pour nous livrer à des calculs pareils », reprend Bengtsson, son homologue suédois. « Et de toute manière », reprend Gottardi, « nos supporters me lyncheraient si nous perdions contre la Suède. Cela peut arriver mais je ne vais pas courir ce risque de plein gré ! »

Avant de choc de styles, les remplaçants polonais ont partagé les points (un match nul de plus) face aux Mexicains (1-1, Kowalski contre Quiñonez) au cours d’une rencontre sans émotion qui gâche la belle image laissée par la Pologne jusqu’ici. « Comprenez-nous, la fatigue des matches contre l’URSS et la Suède a été accentuée par l’élimination », plaide Zabrodski. « Nous ne pouvions pas faire mieux », constate de son côté le capitaine mexicain Gutiérrez.

Leif Bengtsson, qui fut un des finalistes du Mondial 1958 et disputa plus de 150 rencontres de Calcio sous le maillot de la Juventus, a fait le tour de la planète football. Il sait que le Brésil, dans une rencontre cruciale de Coupe du monde, ne peut être qu’égal à lui-même, c’est-à-dire redoutable et virtuose. Il a également enregistré le fait que ses hommes, amateurs pour la plupart (pas de clubs professionnels en Suède, hormis Malmö FF), en sont à leur quatrième match en dix jours et sortent d’une intense bataille contre la Pologne. Enfin, il connaît les limites de son équipe, notamment défensives et techniques, ce qui rendrait sa qualification en quarts de finale quasiment miraculeuse, surtout en regard de la leçon reçue face aux Soviétiques une semaine plus tôt (défaite 3-2).

Prenant tout cela en compte, il construit un milieu de terrain à quatre éléments au service d’une ligne d’attaque composée du grand Engström et du petit Nystén (sorties de Kihlberg et Stefansson) puis demande à ses hommes d’être rigoureux, de resserrer les lignes et d’espérer un coup fumant.

Celui-ci manque d’arriver après six minutes quand le capitaine et stoppeur Britto, très peu à son avantage depuis le début de l’épreuve, adresse une passe molle en direction de son gardien, que Nystén chipe mais exploite mal. Gottardi, qui a pris le risque d’aligner un 4-4-2 avec Elefante et Edivaldo en pointe et un milieu de terrain très offensif (Alan Queimado, Márcio Serpa, Teo Dias, Andrezinho), a demandé à ses joueurs de garder le ballon au sol, de le faire tourner et de secouer les Suédois par des brisures de rythme. Las, ce sont les Suédois qui passent leurs adversaires au shaker. Cinq fois, dix fois au cours de la première demi-heure, ils auront l’occasion d’ouvrir le score, manquant seulement d’un peu de réalisme et victimes de Moacyr, l’excellent gardien brésilien (« Gilmar a un fils », diront les observateurs).

Dominer n’est pas gagner, ce que confirment tous les entraîneurs de café du commerce. L’adage se vérifie dès la 35e minute, alors que les Suédois ont un peu baissé le pied : Márcio Serpa, le petit génie de l’entrejeu brésilien, hypnotise deux défenseurs, s’appuie sur Edivaldo et ouvre le chemin du but à Rómulo, le latéral gauche monté discrètement. Son coup de canon laisse Sandqvist sans réaction, un-zéro.

Les Suédois accusent le coup mais restent dans le match malgré un envoi de Teo Dias sur la barre. Avec Stefansson en renfort, ils attaquent la seconde période fleur au drakkar et s’offrent l’égalisation par Engström ! Malheureusement, le point est refusé pour un hors-jeu de position. Injuste mais on a encore rien vu. A la 71e minute, Stefansson croit enfin avoir marqué un but entaché, selon M. El Kaci, d’une charge sur le stoppeur adverse. Le jeu reprend avant que les Suédois n’aient eu le temps de se replacer, le contre part à la vitesse de l’éclair et finit dans les pieds d’Edivaldo qui, seul face au gardien, ne rate jamais la cible, deux-zéro. Le cynique Brésil, qui ne s’y était pourtant pas préparé, a joué un match de rapines, se soumettant au feu suédois et plaçant des contres aux moments opportuns. Il est ainsi qualifié, invaincu et sa capacité d’adaptation à toutes les situations de jeu en fait le grand favori de l’épreuve. Sur son chemin, se dressent la France ou l’Espagne en quarts, avant l’Angleterre ou la Belgique en demi-finales.

L’URSS, lui, garde sa deuxième place. Épanoui, également invaincu, il a une bonne semaine avant de préparer son quart de finale et ne craint pas grand monde. Même la RFA ?

Verdict du groupe B : 1) Brésil 7pts (7-2) ; 2) URSS 5pts (7-6) ; 3) Suède 3pts (8-8) ; 4) Pologne 3pts (3-4) ; 5) Mexique 2pts (4-9)

2 juillet

Ça y est. Nous y sommes, ils y sont, on y est. Quelque soit son degré d’implication, le supporter français sent que le jour est venu pour son football de sortir de lui-même. Cette nuit, à quatre heures du matin (19 heures à Vancouver), l’Hexagone veillera ses Tricolores qui tenteront d’arracher à l’Allemagne de l’Ouest une victoire indispensable à la qualification en quarts de finale. Plus tôt dans la journée (soirée ...), le Nigeria n’était pas parvenu à voler à l’Espagne le point qui aurait quasiment éliminé les Ibères. Au contraire, ces derniers, bien que crispés en première période (réminiscence du nul contre la Colombie), se sont réveillés en seconde. A la pointe de l’épée, Quique Romero, « l’escrimeur génial », déjà auteur de deux buts dans la compétition, s’offre un triplé (64e, 78e, 86e) et s’empare de la première place au classement provisoire des pointeurs. Adulé par les supporters de l’Atlético Madrid, contesté par les autres, il met sur orbite une selección qu’il fréquente depuis sept ans au gré de ses caprices et fâcheries. Le soir même, riche de 16 buts internationaux (pour 30 capes) et auréolé d’une gloire toute fraîche, il s’installe dans son divan, avec ses collègues, dans l’espoir de voir la RFA « jouer le jeu », selon les mots du sélectionneur espagnol Moncho Díaz. Jouer le jeu ? Cela signifie ne pas perdre contre la France.

Désormais troisième avec quatre points et une différence de buts inférieure à celle de l’Espagne, la France n’a qu’une seule issue : battre la Mannschaft. « Cela vaut bien une nuit blanche », encourage le reporter de la télévision française, dont les commentaires restent modérés par rapport à ceux qui voudraient y régler des comptes remontant parfois jusque Verdun. Heureusement pour les Bleus, un océan les sépare de cette hystérie qui saisit l’Hexagone. Dans sa chambre, la veille au soir, Albert-Michel Henry a réuni ses adjoints pour établir le onze de départ.

« L’épine dorsale » de l’équipe est maintenue, autour du gardien Dilinger et de la charnière centrale Cyr-Dauberty, « au nom de la cohérence », même si l’arrière-garde française a trahi de nombreux signes de fébrilité. Le trio du milieu, Pellequin-Ostermoz-Stora, est reconduit malgré les réticences émises au sujet du premier nommé. Sur les côtés de la défense, du nouveau. Le Gall suspendu, Thomas décevant, Henry lance, à droite, le Strasbourgeois Juntz (« le plus Allemand des Français ») et, à gauche, adapte le polyvalent Stéphanois Samselem. Devant, Coeda le Marseillais a conquis sa place à droite mais le sélectionneur surprend en laissant Pontal et Hutin sur le banc pour aligner deux attaquants mobiles, Thérésine et le Nantais Peillon, à charge pour Stora d’occuper l’aile gauche en alternance avec Samselem. Le but du stratège français est de privilégier la variété et le mouvement afin de surprendre les gros modules allemands, qui se prennent assez facilement les pieds dans la semoule.

Dans un premier temps, ce projet ambitieux ressemble à une grosse blague. Les Français tremblotent et la RFA, malgré cinq titulaires au repos (Lippmann, Göllwitz, Pfinnitz, Husser, Knoben), pose lentement sa main de fer sur le jeu. A la 18e minute, Köppe, le percutant attaquant de Cologne qui a perdu sa place de titulaire, s’est déjà présenté face à Dilinger mais a trop croisé son tir. Le gardien alsacien intervient encore à la 25e sur un coup-franc-canon de Kühnert et souffle un bon coup quand Ostermoz sauve sur la ligne un corner direct de Stihl. En face, Stora est mis en boîte par Volckers et sans son voltigeur, l’équipe de France n’a plus d’ailes. Heureusement, malgré une défense qui laisse flotter les rubans et une attaque inoffensive, les Bleus équilibrent lentement les débats. Avant la mi-temps, Coeda tente une percée coupée in extremis par Möhry. A la pause, tout semble encore possible.

Quelle mouche va alors piquer Pellequin, solide jusqu’ici ? En deux minutes, il va se concéder un penalty (transformé), écoper d’un carton jaune sur le coup (main dans la surface) et se faire expulser pour un second avertissement après avoir contesté une décision de l’arbitre ecossais M. Banks. « Naïveté », « gâchis individuel d’une oeuvre collective », « pire qu’un crime, une faute ! ». Le pauvre José Pellequin devient objet de l’opprobre nationale et les Bleus, qui ne veulent pas mourir, réagissent en un rush désespéré. Pontal et Hutin entrent en jeu aux places de Thérésine et Coeda, ce dernier sur les rotules. Curieusement, dans ce schéma bâtard (quatre défenseurs, un milieu axial, Stora et Pontal excentrés, deux avant-centres), l’équipe de France retrouve un équilibre, se bat et fait rêver le BC Place de Vancouver, qui se prend d’affection pour les Coqs.

A un quart d’heure du terme, M. Banks refuse (justement) à Hutin l’égalisation pour une charge sur Wüthrich. A la 81e enfin, Brückler lâche du lest face à la vitesse de Peillon, qui bute sur Wüthrich mais permet à Stora de pousser le cuir au fond. Le petit messin, bien que trottinant, presqu’invisible parfois, est pourtant à l’origine de tous les mouvements français. C’ets encore lui, à la 86e, qui obtient un coup-franc à 25 mètres. L’occasion rêvée ! Roué de coups, hébété de fatigue, il pose le cuir. Il est cinq heures cinquante du matin en France. Le tir du droit du n°10 français s’envole et ... s’écrase sur le haut de la barre allemande. Les latéraux font office d’ailiers désormais : Juntz centre au deuxième poteau, Hörsting dégage mal, Ostermoz reprend, le ballon est dévié au dernier moment et finit dans les tribunes. Le corner ne donne rien à part un contre, les Allemands gèlent le ballon et l’arbitre siffle la fin. Un partout, larmes françaises malgré les chaleureuses félicitations des adversaires. « Tombés mais tête haute », claironne « L’Équipe ». « Plus grands morts que vivants », reprend « France Football ».

A cinq-cents kilomètres d’ici, les Espagnols se congratulent. Que le football est beau, s’exclament les uns. « Qu’il est cruel », déplorent les autres.

Verdict du groupe C : 1) RFA 7pts (8-2) ; 2) Espagne 5pts (6-3) ; 3) France 5pts (6-4) ; 4) Colombie 2pts (3-7) ; 5) Nigeria 1pt (2-9)

Au programme des quarts de finale :

04/07 (Montréal) Angleterre-Belgique
05/07 (Edmonton) Argentine-Yougoslavie
06/07 (Toronto) Brésil-Espagne
07/07 (Vancouver) RFA-URSS

A suivre
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Polska King

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Message non lu Mer 22 Juil 2009 18:08

ça promet vivement les quarts :lol:

et puis il faut rappeler Gorski à la tête de la Pologne ;)
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Hubert Götze

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Message non lu Mer 22 Juil 2009 20:49

Les anglais vont se ramasser comme d'hab. Pour le reste, la logique devrait etre respectée. Et en route pour les 1/2 finales Belgique/Argentine et Bresil/RFA
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Le Cheikh

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Message non lu Mer 22 Juil 2009 22:19

04/07 (Montréal) Angleterre-Belgique England
05/07 (Edmonton) Argentine-Yougoslavie Argentina
06/07 (Toronto) Brésil-Espagne Brésil
07/07 (Vancouver) RFA-URSS URSS

il reste du beau monde...

A la fin, si tu es d'accord Paco, on publiera l'intégralité sur le site Footnostalgie.com

Message non lu Mer 22 Juil 2009 22:49

Argentine - Brésil en finale !
tout un continent en folie ....

et c'est encore la RFA qui nous élimine ! maudite fatalité .... Jamais 2 sans 3, hélas !

fan club José Pellequin ( !!!! )
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Message non lu Mer 22 Juil 2009 23:00

gaoutte a écrit:04/07 (Montréal) Angleterre-Belgique England
05/07 (Edmonton) Argentine-Yougoslavie Argentina
06/07 (Toronto) Brésil-Espagne Brésil
07/07 (Vancouver) RFA-URSS URSS

il reste du beau monde...

A la fin, si tu es d'accord Paco, on publiera l'intégralité sur le site Footnostalgie.com


Volontiers !

Vos réactions me font très plaisir.

Quant aux pronos, j'évite de les lire pour pas être trop influencé. En fait, je n'ai aucune idée des résultats de ces matches. J'improvise, c'est ça qui m'amuse.

Fan club mes fidèles lecteurs
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Message non lu Mer 29 Juil 2009 16:30

Feuilleton footnos: le Mondial imaginaire (8ème épisode)

Lien vers le septième épisode

4 juillet

Les organisateurs de ce Mondial avaient secrètement rêvé, pour sa réussite commerciale, voir le Canada disputer un quart de finale dans le majestueux Stade Olympique de Montréal. Voeu (pas très) pieux victime du réalisme anglais. Les Anglais, justement, rosissent de plaisir au doux soleil du début d’après-midi québécois. Le sort leur réserve l’adversaire le plus abordable (pensent-ils) des quarts de finale et, pourquoi pas, un chemin fleuri vers la consécration dans ce pays ami, belle histoire après 1966.

Manque de chance, Montréal n’est pas vraiment amical... Le quart francophone de la ville (le seul à nourrir de l’intérêt pour la balle ronde) a été séduit par la simplicité des Belges, arrivés il y a quarante-huit heures dans la Belle Province et auréolés du statut de tombeur de géants après l’élimination de l’Italie. Montréal prend donc fait et cause pour les Diables Rouges, leur jeu direct et musclé, leur solide santé et leur simplicité. L’Angleterre reste l’ancien colon et, malheureusement pour la sélection aux Trois Lions, draine toujours sa cargaison de viande soûle. Après de nombreux incidents causés par des supporters anglais éméchés dans les centre-villes de Québec, d’Hamilton et de Montréal, le quotidien « La Presse » a barré sa une d’un « Les Barbares sont là », le ministre fédéral canadien de l’Intérieur s’est publiquement indigné et son homologue britannique lui a demandé « qui avait laissé rentrer ces énergumènes ? » En prévision, les Anglais avaient transmis au Canada un fichier signalant les supporters dits dangereux. Sans effet.

Le 4 juillet à 15 heures (21 heures en Europe), le Stade Olympique suinte donc l’hostilité anti-anglaise, ce qui contribue à motiver les Anglais, réputés têtes brulées. Dès la troisième minute, Colin Morrow fait exploser Temmerman d’un tacle appuyé mais régulier. Un douzième de cadran plus tard, Sammy Longford confond la tête de Courant avec le cuir. L’arbitre M. Schurmann, instituteur suisse d’1,90m, distribue les bons points. Carton jaune pour Longford puis pour Thorngood qui discute la décision. Trevor Basildon, le sélectionneur anglais, hoche la tête de dépit : ce football violent n’est pas le sien. Depuis le début de l’épreuve, son équipe lui échappe, ses consignes se perdent dans la nature. Sent-il aussi, en creux, ses hommes perdre le fil du jeu par excès de bile ?

Toujours est-il que la Belgique, commandée par Wilfried Smet, « l’entraîneur le plus calme du monde » (selon son capitaine Marc Luyckx), déploie son jeu dans le tumulte, sans génie mais avec une étonnante efficacité. En pointe, De Baecker et Neyrinckx éprouvent la solidité de la défense adverse, le premier en force, l’autre en finesse, le tout devant un bloc milieu-défense très homogène et apte à remonter rapidement le ballon avec un minimum de déchets. A la 34e minute, juste à point, Temmerman échappe aux crampons de Morrow, feinte la frappe et sert Galens à l’entrée de la surface. Le Standardmen, encerclé, se sert de De Baecker comme pivot et place un envoi précis dans le petit filet du but de Statham. A la mi-temps, la Belgique mène un-zéro le plus logiquement du monde.

Cet affront au football anglais, infligé à la face du monde, est trop violent pour ne pas susciter de réaction. Basildon adresse à ses joueurs un sermon à faire vibrer les poutres du stade (« on aurait dit Churchill pendant la guerre », témoignera Gary Cook), en appelle à l’honneur de ses joueurs et lance en pointe Graham North, l’attaquant d’Ipswich, à la place de Hintley. Drôle d’histoire de celle de North, jeune attaquant de 21 ans qui se destinait au cricket avant qu’un accident de moissonneuse-batteuse ne lui fasse changer de sport à la puberté. Les progrès du jeune homme balle au pied (et non batte au poing) ont été fulgurants au point que Basildon l’a inclus dans sa liste des vingt-deux avant de le lancer pour forcer la décision. Six minutes après son entrée en jeu, North a égalisé.

Stupeur belge mais pas de tremblements. Smet se contente de demander à ses hommes de se regrouper et d’attendre les contres : « les Anglais manquent d’imagination. Je savais qu’ils attaqueraient en rafale et perdraient leur lucidité. C’était à nous d’en profiter. »

Les vieux sages ont toujours raison. Campés sur le but de Thyssen, en passe de devenir héros national après son excellent match contre l’Italie, les Belges posent du mastic partout, utilisent le piège à bêtes (le hors-jeu), répondent aux provocations sans (trop) sombrer dans la violence (Coorts averti contre trois autres cartons jaunes aux Anglais) et sortent progressivement de leur tanière au fur et à mesure que les Bretons fatiguent.

A la 77e minute, curieuse symétrie avec la première période, Temmerman longues jambes récupère un ballon au milieu et s’envole dans l’une de ses chevauchées qui ont fait sa gloire sous la maillot d’Anderlecht. Grand et laid, perché sur des échasses toutes maigres, il échappe comme le vent aux faucilles adverses et offre sur un plateau le deuxième but à De Baecker. Le taureau brugeois ne manque pas l’offrande, le Stade Olympique jubile et, sans bruit, sans prétention, la Belgique se glisse en demi-finales de la Coupe du Monde.

Les Diables sont fêtés, adulés, loués et restent lucides. « On est si bien ici qu’on a eu envie de rester », s’amuse Wilfried Smet. « Donnez-nous vingt-deux Belges et nous ferons un monde meilleur », affirme « L’Équipe ».

5 juillet

L’Argentine est dans la même situation que l’Angleterre, favorite de son quart de finale face à la Yougoslavie. A la différence près qu’un pays entier l’attend comme la Providence. Si les Anglais savent se faire une raison dans la défaite, les Argentins brûlent d’un feu footballistique sans équivalent en Europe et aiment leur sélection d’une passion violente, inquiétante. Tout le pays attend le sacre mondial pour oublier ses tourments. Le sélectionneur Evaristo Pastor en est tellement conscient qu’il multiplie depuis six mois les stages à huis-clos afin de soustraire ses internationaux à la pression populaire. Dans le même but, les albicelestes étaient les premiers à pied d’oeuvre sur le sol canadien.

Le calendrier, clément, a laissé aux Argentins huit jours entiers de repos avant ce match, avec un petite transhumance vite digérée entre leur camp de base dans le Manitoba et Edmonton. Les Yougoslaves, en revanche, ont fait le lointain voyage depuis l’est du pays et ont encore dans les jambes le match contre le Maroc. Entre Argentins surmotivés et Yougoslaves fatigués, la balance penche vers les premiers.

Elle penche aussi vers le spectacle et le football chatoyant que promettent ces deux équipes fantasques. Les Yougoslaves, on le constate très vite, sont à la hauteur du défi. Il ne manque pas une vis à leur mécano défensif et le milieu de terrain Capljic-Kovac-Brnovic-Maric (Djelenka sur le banc) répond en virtuosité au trio Zetti-Roldán-Gauterio (Campano blessé). Conséquence, ce sont les Yougoslaves qui tirent les premiers au but. Capljic alerte Medina de la tête et Zilic, le jeune bosniaque de 20 ans (Karic sur le banc, lui aussi), voit sa reprise de volée déviée ... par un équipier et filer à côté.

Même quasiment réduits à dix (Moreni, neutralisé, ne touche pas un ballon), les Argentins n’en sont pas moins potentiellement redoutables. Puisque l’axe est bouché, ils investissent les couloirs où les latéraux Alcocer et Blawnik sont trop heureux de respirer le grand air de l’offensive. Le match s’équilibre, le gardien yougoslave Topic doit intervenir avec classe sur un coup-franc de Zetti.

A la demi-heure de jeu, un malentendu va cependant modifier les données de ce match prometteur. Corrado, l’attaquant argentin connu pour son tempérament explosif, s’en prend soudain violemment à Topic, le gardien yougoslave, et se fait étendre pour le compte par Pecovski. L’arbitre israélien M. Shan, salomonique, expulse le vengeur et l’agresseur, un verdict que ne supporte pas Corrado. Il se défend avec véhémence, affirmant que Topic l’a insulté en espagnol (il joue à Valladolid). Celui-ci soutiendra pour sa défense qu’il s’adressait à un partenaire en yougoslave.

Qui a raison ? L’affaire restera un mystère mais le match doit se poursuivre. Avec un homme de moins de chaque côté, il ne pourra plus être le même. C’est l’Argentine qui s’adapte le plus vite aux nouvelles données. Moreni se déporte franchement en pointe aux côtés de Torrevilla et s’offre un peu d’air tandis que Kocija doit sacrifier un milieu de terrain (Maric) pour reconstituer une défense centrale avec l’entrée du géant Ilic (1,92m). Torrevilla par deux fois, Gauterio et Blawnik créent le danger mais Topic veille.

Les contacts s’aiguisent et l’acidité est palpable. Le jeu se glisse dans les interstices mais les artistes (Brnovic, Capljic d’un côté ; Moreni, Roldán de l’autre) passent plus de temps à terre que balle au pied. La mi-temps est atteinte sur ce goût amer, « double zéro à dix contre dix, chiffres fatals à un match qui augurait tant de belles choses », regrette « L’Équipe ».


Si le spectacle s’évanouit lentement, le suspens gonfle. L’humidité qui règne sur l’Alberta use les organismes et alimente la tension. Moreni, sur un fil, efface Ilic mais hésite un instant de trop entre tir et passe. En réponse, Zilic récupère un centre mal dégagé de Brnovic et frappe de peu au-dessus. A vingt minutes du terme, Kocija sort Capljic, perclus, et lance Karic dans la marmite. Le vieux héron lyonnais a l’air plus renfrogné que jamais et se distingue tout de suite par quelques arabesques sur son côté favori (le gauche).

Pastor, de son côté, ne bouge pas. Debout, silencieux, impénétrable dans son long manteau noir, il a l’air d’un empereur commandant ses troupes par télépathie. La fin approchant et, avec elle, la perspective d’une prolongation, il attend le dernier moment pour procéder à ses remplacements. Zetti, touché en début de période, réclame pourtant à sortir. Pastor ne réagit pas, il sait le danger que peut représenter le n°8 de la Boca Juniors sur les coups de pieds arrêtés. Il prévoit de ne le remplacer qu’à la première minute de la prolongation, si elle doit avoir lieu.

A cinq minutes du terme, Medina intervient dans les pieds de Karic et relance vite. Alcocer remonte le terrain pour la cinquantième fois de l’après-midi. Arrivé dans le camp adverse, il sollicite un jeu en triangle que Kovac interrompt d’un coup de scie. Coup-franc à trente mètres des buts. Le mur se forme : Zetti, malgré son mollet douloureux, est derrière le canon. Il fait mine de frapper mais, au dernier moment, reprend son geste en une petite passe vrillée qui contourne le mur. Moreni, caché entre deux adversaires médusés, démarre comme une Yamaha, amortit le cuir, le caresse deux fois avant de le loger avec violence dans le plafond des buts de Topic, figé de stupeur.

C’est le quotidien espagnol « As » qui parlera le mieux de ce but, le seul du match, qui qualifie l’Argentine en demi-finale : « on nous avait dit monts et merveilles de ce gamin dont chaque pied est une main, chaque toucher de balle un pas de danse. Son talent avait été jusqu’ici trop intermittent, éclipsé par l’enjeu et la dureté d’une compétition sans répit. Et soudain, l’éclair, le geste venu de nulle part, l’inspiration née du génie, dans lequel se mélangent efficacité et plaisir des yeux. Même les Yougoslaves ne semblaient pas abattus car ils avaient été, bien malgré eux, acteurs de ce but qui, déjà, resterait dans l’histoire du Mondial. »

« Il n’y a pas de honte à s’incliner face au talent, quand celui-ci est pur », reconnaît, grand seigneur, Ivica Kocija. Buenos Aires en liesse ne l’entend déjà plus.

A suivre
Dernière édition par pacoborel le Mer 26 Aoû 2009 12:07, édité 1 fois.
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Message non lu Jeu 30 Juil 2009 8:38

super pour les Belges


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Le Cheikh

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Message non lu Jeu 30 Juil 2009 20:10

Je voyais l'Argentine en Finale. Que de surprises.....
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Message non lu Jeu 30 Juil 2009 22:53

gaoutte a écrit:Je voyais l'Argentine en Finale. Que de surprises.....


Relis bien tu seras moins surpris ...

Message non lu Ven 31 Juil 2009 0:26

Temmerman n'est il finalement qu'un postulant pour les "Ils n'ont brillé qu'un seul été" ?
Zetti sera-t-il amoindri pour les 1/2 ?
Le suspens ne fait que commencer ...
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Hubert Götze

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Message non lu Ven 31 Juil 2009 10:02

Aura t-on droit a un Argentine/Belgique en demis ou tirage au sort intégral ? Je vois bien un remake de 86 avec Argentine/Allemagne en finale. Et comme toujours en pareil cas - phase finale hors Europe - victoire des albicelestes.
Moreni est en route pour le Ballon d'Or
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Message non lu Ven 31 Juil 2009 11:04

Ah non l'Argentine affronte le vainqueur de RFA-URSS et la Belgique celui de Brésil-Espagne.

Les Sud-Américains rêvent tous d'un Brésil-Argentine en finale bien sûr.
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Hubert Götze

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Message non lu Ven 31 Juil 2009 19:52

La RFA va balayer les russes en mode Euro 72. Ca va etre le grand retour de la tornade blanche
M'etonnerait pas que certain russes demande l'asile politique au Canada apres cette debacle annoncée :gdit:
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Message non lu Mer 05 Aoû 2009 15:08

Feuilleton footnos: le Mondial imaginaire (9ème épisode)

Lien vers le huitième épisode

6 juillet

Quand l’arbitre italien M. Sassetti siffle le coup d’envoi du quart de finale opposant le Brésil à l’Espagne au Rogers Centre de Toronto, il y a bien longtemps que le match a débuté, mais dans la presse. Guerre de déclarations, de sous-entendus, d’accusations mutuelles. Les Brésiliens sont favorisés par l’arbitrage, selon les uns. Les clubs espagnols tentent de faire tourner la tête des joueurs Auriverdes en leur proposant, en plein Mondial, des offres mirobolantes « afin de les déconcentrer », selon les autres. Baltemar Gottardi s’est étonné de voir des émissaires de l’Atlético Madrid pénétrer la résidence de la Seleção (ce que le club colchonero dément) à deux jours du match et les Espagnols, en réponse, se sont demandés pourquoi leurs adversaires avaient pu rester dans leur stade du premier tour et bénéficier d’un jour de récupération en plus. De plus, la désignation de M. Sassetti, invité habituel de la confédération brésilienne, a causé des haussements de sourcils. « La présence de João Havelange à la tête de la FIFA ne doit pas y être étrangère », insinuent les Espagnols.

Bref, les esprits et les muscles sont chauds à l’heure du coup d’envoi. Pourtant, les principaux concernés - les joueurs - sont restés d’une admirable discrétion et maintiennent les débats dans les limites du correct. Il faut dire que le jeu, rapide et électrique, exige une concentration extrême. La rencontre est intense : le Brésil confisque le ballon et l’Espagne réplique par des contres coupants. Moacyr, le portier brésilien, plonge dans les pieds de l’insaisissable Quique Romero et soupire d’aise quand un tir d’Adurní Alonzo, seul aux quinze mètres, s’envole dans les tribunes.

Le Brésil se gorge de domination stérile malgré une attaque à trois (Edivaldo-Elefante-Josué) car, derrière, personne ne donne l’inspiration, les milieux étant trop concentrés sur leur tâches défensives. « Je m’étonne de la volonté de la part des responsables brésiliens de vouloir ‘européaniser’ à outrance leur jeu », constate Albert Batteux. « S’il y a bien une chose sur laquelle le Brésil doit s’appuyer, c’est l’incroyable virtuosité de ses joueurs, faite d’une éducation sportive spontanée impossible à reproduire nulle part ailleurs. Etouffer ces qualités intrinsèques pour en développer d’autres (rigueur, efficacité) qu’ils ne possèdent pas au berceau est faire fausse route. »

Difficile de contredire l’ancien sélectionneur français, désormais chroniqueur radio. Le Brésil, affûté physiquement, règne dans la récupération et la possession du ballon mais où sont les artistes ? Où est le brin de folie ? Son bilan aride du premier tour (sept buts marqués, deux encaissés) ne lui ressemble pas. Cette première demi-heure de jeu, faite d’échanges de passes dans l’entrejeu, de centres en profondeur et de tirs de loin, non plus.

La pause atteinte sur un score vierge renforce les espoirs espagnols. Ils sentent si bien le monument vaciller que Moncho Díaz, dans les vestiaires, doit les rappeler à la prudence. « Vous n’affrontez pas une équipe de quartier, poursuivez sur le même rythme mais, surtout, restez groupés. » Ce discours de moniteur de colo passe peut-être trop bien ... car l’Espagne se retranche progressivement et range son audace, ne laissant « que » Quique Romero en pointe. Le match s’endort, pain bénit pour le Brésil qui peut enfin solliciter ses arrières latéraux et créer un surnombre. Rómulo, déjà buteur contre l’URSS, manque de peu de conclure un somptueux mouvement collectif entre Josué, Teo Dias et Andrezinho.

A l’heure de jeu, Gottardi se décide enfin à sortir un de ses trois attaquants (à trois dans un entonnoir, on a du mal à passer) et lance Alan Queimado, le fou-fou gaucher qui provoque des courts-circuits, parfois dans sa propre équipe. Panique dans les sous-bois espagnols où Nacho Pérez et Apolonio, les deux arrières centraux, se perdent dans leur placement (Individuelle ? Zone ?) et sortent le rouleau à pâtisserie. Coup-franc à la 65e minute, botté par Teo Dias à vingt-cinq mètres des buts, décalé à gauche. La balle est déviée, Edivaldo jaillit au second poteau et Santi Gorriz, le gardien espagnol, n’est pas très brillant sur l’action. But pour le Brésil (sur coup-franc, un de plus), qui n’enchante pas mais fait preuve d’un opportunisme étonnant. Son Graal obtenu, il se ferme comme un escargot.

L’absence de réaction des Espagnols, dont on se rend compte qu’ils avaient atteint leur seuil de compétence lors du premier tour, déçoit et provoque d’immenses regrets en France. « Nous aurions eu notre mot à dire contre ce Brésil-là », s’exclament les Tricolores. Bien sûr, mais c’est contre les Espagnols qu’ils fallait « dire ce mot » et ne pas attendre d’être menés pour jouer. La question du réalisme et de l’instinct compétiteur du footballeur français revient encore sur la table.

Les Brésiliens, eux, possèdent ces qualités désormais, au point que le titre leur semble promis. Les Belges, arrivés à Toronto la veille, ont assisté à la démonstration dans les tribunes. Ils considèrent leur adversaire comme on consulte un menu : « jusqu’ici, le Brésil a basé sa réussite sur la conservation de la balle et un faux rythme, constate Wilfried Smet. Si nous inversons les données du jeu et l’obligeons à hausser le tempo, que se passera-t-il ? »

7 juillet

RFA-URSS ou le duel entre deux cultures, deux idéologies, deux façons de voir le sport, deux colosses. Le dôme de Vancouver s’attend à tout sauf à de la poésie. Déjà en 1966, demi-finale du mondial anglais, la rencontre entre aigle et ours avait tourné au pugilat. Depuis, l’URSS a mis un peu d’eau dans sa vodka grâce à la présence massive des fantaisistes Ukrainiens. La RFA, en revanche, a tourné le dos à l’esthétisme en troquant (contrainte et forcée) son inspirateur Rammer pour le gladiateur Volckers.

Le Chilien M. Coronado a été nommé pour arbitrer cette rencontre qui inquiète et fascine. Il a l’expérience, la stature et un visage rébarbatif qui fait peur aux enfants. Quand, après trois minutes, Knoben sèche Zaferyan d’un tacle aux trois-quarts arrière (très dangereux), M. Coronado n’hésite pas et expulse le latéral droit ouest-allemand. Dans l’esprit, rien à dire, mais ce genre de déviation étant communément acceptée, la décision si tôt venue étonne. « M. Coronado n’a pas fait d’erreur de jugement mais seulement de diplomatie, commentera Albert-Michel Henry. Avait-il fait part aux joueurs de ses critères avant le coup d’envoi ? »

Face à l’imprévu, la RFA se réorganise. Puisqu’il va lui falloir lutter une heure trente à dix contre onze, elle s’arme de patience et de colère froide. Stihl, le milieu de terrain duisbourgeois, retrouve le poste de défenseur droit qu’il occupait plus jeune, Volckers bosse pour quatre au milieu de terrain et les ailiers (Pfinnitz, Göllwitz) se replient. Les Soviétiques, l’occasion faisant le larron, devraient se porter à l’attaque, assommer un adversaire déboussolé. Au dépit de tous, ils se contentent d’aller à leur rythme, ne sortant pas d’un schéma prédéfini, par crainte et par excès de discipline. On ne va pas à l’encontre de vingt-cinq ans d’éducation sportive, surtout avec Solopeikin sur le banc, génial tacticien, certes, mais qui l’incite ses joueurs à la débauche offensive que dans l’urgence.

Ainsi, on peut voir Kulak et Pyanov, les deux Kiévotes, zébrer le terrain de courses croisées infructueuses, le ballon restant collé dans les pieds du quatuor de milieu de terrain Zaferyan-Nastichev-Podvintsev-Bakhachkov (un Bélarusse, d’un Russe, d’un Ukrainien, un Tatar).

Devant une telle inertie, les Ouest-Allemands se réinstallent paisiblement et, en vingt minutes, ont dressé la herse devant Wüthrich ! Ce match, que l’on attendait intense, est terriblement décevant, un peu à l’image du Mondial qui, selon France Football, « surgit comme un appendice démesuré au terme d’une longue saison qui a épuisé les forces physiques et morales des professionnels européens et sud-américains. La plus belle compétition de la planète ne devrait-elle pas être disputée par des athlètes au mieux de leur forme et, pour cela, faire l’objet d’un programme spécifique de préparation, comme les Jeux Olympiques ? La FIFA n’échappera pas à une remise en question après ces quarts de finale pingres (six buts en quatre matches) dont trois ont délivré le même scénario : un but et fermeture de la boutique. »

« Ce n’est pas un hasard si l’équipe la plus enthousiasmante de ce premier tour fut le Maroc, dont les joueurs ont bénéficié d’une plage de repos et d’une mise en condition progressive favorisée par l’arrêt anticipé du championnat. Mais, au Maroc, la fédération peut sans mal imposer ses doléances à des clubs le plus souvent amateurs et qui dépendent entièrement d’elle... Ce n’est pas un hasard non plus si ce même Maroc a tout de même été éliminé au premier tour d’une compétition réservée aux réalistes. Pas un hasard si le grand homme de l’épreuve est pour l’instant Dennis Volckers, un joueur de grande qualité mais dont le style abrasif et porté sur l’efficacité ne fait pas vraiment rêver les stades. En tout cas, les néophytes Nord-Américains, friands de sports virils, ont eu avec cette Coupe du monde leur content de contacts. Les amateurs européens ont dû, en revanche, ranger leurs illusions. »

L’éditorialiste de l’hebdomadaire dressera ce constat désabusé au lendemain de ce RFA-URSS, dont les trois faits saillants seront, en fin de compte, les expulsions de Knoben, du défenseur soviétique Kasapov (pour une agression, elle aussi délibérée, sur Lippmann) et ... le but Ouest-Allemand, marqué à la 44e par l’ailier Göllwitz sur l’un des six tirs cadrés du match, une reprise du gauche consécutive à une remise de la tête de Lippmann.

L’avantage obtenu, la RFA posera son ciment sur la pelouse avec Volckers à la truelle et une défense en béton armé. Les joueurs Soviétiques se reprocheront (un peu tard) leur manque d’audace et d’opportunisme. Leurs dirigeants, plus pragmatiques, licencieront Solopeikin (envoyé dans le Nord de la Finlande pour une mission « diplomatique à caractère sportif » auprès de la fédération locale) et nommeront à la tête de la Sbornaïa Anatoli Tironchev, l’homme qui a fait le Dynamo Kiev. Heureuse idée dont ils cueilleront les fruits quelques années plus tard.

En attendant, la RFA est toujours là. L’Argentine se dresse face à elle mais ses jambes flagellent.

A suivre
Dernière édition par pacoborel le Mer 26 Aoû 2009 12:08, édité 1 fois.
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Hubert Götze

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Message non lu Jeu 06 Aoû 2009 19:05

Dans un match haché et surtout tres engagé, la RFA va s'imposer en force face aux argentins (1-0) qui termineront le rencontre a 8. Moreni va peter les plombs et causera la perte de son équipe en se faisant expulser a la 55ème minute.
Le Bresil va se qualifier sans trop de soucis (2-0) mais la presse louera l'excellent parcours des belges
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Le Cheikh

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Message non lu Ven 07 Aoû 2009 14:06

Brésil Argentine en finale. Combien tu paries ? :lol:

la Belgique, qui a laissé pas mal de force dans les matchs de qualif' se faisant écraser en demies par plus de 3 buts d'écart.
L'argentine passera dans la douleur en demies ( prolong' ou pénos )
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Equipe Réserve Footnostalgie

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Message non lu Mar 11 Aoû 2009 16:45

Verdict des demi-finales demain !
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Equipe Réserve Footnostalgie

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Message non lu Mer 26 Aoû 2009 12:11

Un peu d'autopromo, je réédite le premier volet. A la fin de chaque épisode, j'ai mis un lien vers le suivant afin de faciliter la lecture. Bon amusement à ceux qui veulent s'abîmer les noeils.

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