Alfred Nakache le nageur d'Auschwitz :Si les Toulousains fréquentent la piscine Nakache, connaissent-ils pour autant létonnant destin dAlfred Nakache dont le nom fut donné, après la Libération, à la « piscine dhiver du Parc municipal des sports » en 1945 ? Rien ne prédestinait le futur champion à senraciner dans la « ville rose » aux Dauphins du TOEC. Né en 1915, dans la communauté juive de Constantine, alors française, surnommée « La Petite Jérusalem » en raison des liens très forts dimmigration avec la Terre promise, le jeune Nakache se découvre de réelles qualités physiques pour la natation. Afin daller au bout de sa passion, il rejoint Paris, en 1933. Il a 17 ans.
Deux ans plus tard, il décroche son premier titre de champion de France. Tout en intégrant lEcole normale supérieure déducation physique (ENSEP), le jeune nageur profite de la politique sportive du Front Populaire. Sélectionné aux JO de 1936, à Berlin où il ne put donner la mesure de son talent, Nakache appartient à cette génération de sportifs dont la carrière fut brisée à cause de la politique et de la guerre. Et ce, alors quil sétait affirmé entre 1937 et 1938 comme un athlète de premier plan, de surcroît très populaire dans la presse sportive. Dès le début de lOccupation, quand Pétain abolit le décret Crémieux, le champion Nakache, plusieurs fois primé, est déchu de sa nationalité française. Il décide alors de se réfugier, avec sa femme, en zone non occupée, à Toulouse dans le quartier Saint-Cyprien où il bénéficie des solidarités du milieu sportif. Il est accueilli, en 1941, par lentraîneur Albin Minville dans le club du TOEC, fondé en 1908. Dans ce milieu chaleureux, il poursuit la natation, diversifie ses nages tout en améliorant sa technique. Le club lui fournit aussi un travail comme responsable dune salle de sport, rue Paul-Féral.
Paradoxalement, Alfred Nakache, se trouve revivifié (nombreuses performances dont un record mondial au 200 m brasse) et profite indirectement, au cours de lannée 1941, de la politique dynamique initiée par le ministre des sports de Vichy Franck Borotra qui récupère limage du champion « héros nécessaire » au régime. Cependant, après le retour de Laval au pouvoir, en avril 1942, puis après linvasion de la zone sud par les Allemands, la législation antisémite se durcit. Au cours de lannée 1943, la presse prend pour cible le nageur lempêchant de participer aux Championnats de France. Nakache est finalement arrêté avec sa femme et sa petite fille en décembre 1943 et leur appartement livré au pillage. De la prison St Michel il est conduit à Drancy puis à Auschwitz (le 20 janvier 1944, dans le convoi 66) où sa femme et sa fille sont conduites à la chambre à gaz alors que sa constitution physique sauve le nageur. Matricule 172763, Nakache est conduit à Auschwitz III où il est affecté à lhôpital du camp assistant le médecin.
Si Nakache a tenu dans cet enfer, fût-ce à linfirmerie, cest parce quil conserva toujours lespoir de revoir sa femme et sa fille dont il ignorait le sort et quil parvint à nouer des amitiés solides avec Willy Holt, Victor Perez ancien champion de boxe et Noah Klieger. Devenu objet de curiosité après avoir été identifié comme nageur par les gardiens du camp, il fut obligé de nager sous leurs yeux, « nageur dAuschwitz » dans une sorte de grande mare. Devant lavancée des Russes, Nakache est transféré à Buchenwald, camps alors surpeuplé où il passa trois longs mois début 1945.
Libéré, après une période de convalescence, il se réinstalle à Toulouse et grâce aux solidarités du TOEC et à son mentor Albin Minville parvient à revenir, à force dénergie, au plus haut niveau, huit mois après sa sortie des camps. Resté très populaire parmi un public qui vient le soutenir, il eut le courage de rapporter son expérience de la déportation. Après avoir participé aux JO de Londres en 1948, il achève sa carrière sportive au début des années 50 se consacrant avec passion à sa carrière de professeur dans sa salle de sport auprès des jeunes du TOEC et du TFC en tant que kiné.




j'attire votre attention sur cette expo qui se tient au mémorial de la shoah (je vais essayer d'aller y faire un tour) :
http://www.la-croix.com/Actualite/S-inf ... -10-734395